Un passage à l’adolescence qui questionne identifications au groupe de pairs
L’été 1990 marque aussi le passage abrupt de l’enfance à l’adolescence pour la jeune Tekehentahkhwa. Dans Beans, l’identification aux pairs et la recherche d’un nouveau statut social se retrouvent étroitement mêlées à la question de l’appartenance au groupe des Mohawks. Lorssque l’héroïne rencontre April, issue de la même communauté mais vivant dans une famille défavorisée, l’enjeu est en effet plus grand qu’un t-shirt coupé au-dessus du nombril ou de l’alcool acheté en cachette ; l’acceptation de Beans par April et son groupe d’amis lui signifie qu’en plus d’être passée dans le camp des grandes, elle est également une vraie Mohawk. Tout écart sera d’ailleurs sévèrement puni, souvent de manière violente et physique. La forêt sacrée, d’abord lieu privilégié des jeux d’enfants entre Beans et sa sœur Ruby, fait place à des séances de boxe entre April et Beans ainsi qu’à des moments de flagellation « pour cesser d’être un bébé ». L’adolescente cherche à rompre avec sa famille (se rapprochant de la classe moyenne puisque sa mère est assistante de direction) pour mieux adopter les comportements et les valeurs des autres jeunes plus déclassés de la communauté mohawk. A cet égard, Beans sera sans cesse tiraillée entre les désirs de sa mère qui la pousse à s’inscrire dans une école socialement valorisée et ses nouveaux amis qui se montrent très véhéments contre « cette foutue école de blancs » Cette école reflète donc un choix identitaire très important pour Beans, et l’évolution de son attitude montre bien le conflit de loyauté dont elle a du mal à se défaire.
Passage obligé de tout·e adolescent·e ou nécessité de montrer le besoin de s'endurcir le plus rapidement possible au vu du contexte ? Tracey Deer rend très bien les contradictions dans lesquelles est prise Beans, qui doit construire ses expériences et son identité, entre un monde allochtone dominant et la communauté mohawk dominée.